Se reconstruire après l’exil
Espace 28 accueille une partie des nombreux réfugiés, demandeurs d’asile ou « sans-papiers », qui atterrissent à Verviers et dans la région.
Maxime, volontaire local pour le projet « Tandems Solidaires »
Maxime parle du projet Tandems Solidaires et de son binôme :
On a un peu échangé une première fois. Evidemment pour une première fois, c’est toujours un peu gênant, on ne sait pas trop quoi se dire. On essaie de parler anglais du mieux qu’on peut mais ça fait longtemps qu’on n’a plus parlé. Et on a pris rendez-vous par sms. Et on s’est rencontré une première fois dans ma voiture parce qu’il pleuvait. Et on est resté 2, 3 heures dans ma voiture à écouter de la musique, à échanger. On fait tous les 2 beaucoup de musique. Il chante, moi je fais des prod, je fais de la guitare et tout ça donc j’ai eu l’occasion d’enregistrer sa voix sur une de mes prod et en même temps je lui apprends à jouer de la guitare. Et voilà, on s’amuse beaucoup autour de ça en général.
Le plus souvent, ces migrants vivent des situations de détresse et de stress importantes. Personne ne quitte son pays d’origine par plaisir ! La pauvreté, la violence et les persécutions qui ont poussé à l’exil, la famille restée au pays et dont on n’a pas de nouvelles, les difficultés à survivre dans un nouveau pays où l’on n’est pas toujours bien accepté, l’incertitude de l’avenir, la difficulté de la langue, la complexité et l’angoisse des procédures administratives constituent autant d’épreuves qui fragilisent des individus déjà usés par la vie et pour lesquels le repli sur soi, l’isolement et la précarité ne sont jamais loin.
Raheela, volontaire étranger pour le projet « Tandems Solidaires »
Raheela parle de son binôme, Marylène, qui l’a beaucoup soutenue lorsqu’elle a été touchée par les inondations :
Le mois dernier, il y a eu beaucoup d’inondations en Belgique. J’ai eu très très peur et je me suis évanouie mais Marylène est venue dans ma maison, elle a frappé à la porte. Un ange est entré dans ma maison et m’a apporté beaucoup d’aide. Marylène et une autre dame sont venues m’aider ensemble. Elles ont appelé l’ambulance et je suis partie à l’hôpital. Marylène est venue chez moi et a pris soin de moi. Marylène est très très gentille.
Depuis 2011, le service d’accompagnement psychologique soutient des personnes exilées victimes de torture, de mutilations, de traitements inhumains… Les psychologues ont des formations spécifiques et une expérience importante dans la prise en charge de ces personnes migrantes. C’est un projet unique, reconnu dans tout l’arrondissement de Verviers.
À côté des consultations psychologiques individuelles, tenant compte de la langue de la personne (interprètes), de la culture, de sa situation administrative et qui traite des problématiques peu habituelles pour des services plus généralistes (mutilations génitales féminines, tortures, traitements inhumains, mariages précoces, …), l’association propose aussi des activités communautaires : groupes de paroles, ateliers couture, espace de rencontres pour les femmes.
Témoignage de l’Espace Rencontre Femmes organisée par Espace 28. Témoignage inspiré par le parcours de femmes arrivées depuis peu sur le territoire européen.
Désirée
Je m’appelle Désirée. C’est une ironie du sort car je mène une vie que je n’ai pas vraiment désirée. Je vis depuis peu dans une société qui semble ne pas me désirer. Ma couleur de peau est un obstacle dans ma société d’accueil. Chaque jour, mon origine me confronte à des difficultés. J’ai l’impression que rien n’est fait ici pour les personnes noires. Ah si j‘étais blanche ! Les blancs ont toujours eu droit à tout, depuis toujours. Meilleurs services, meilleurs postes, meilleurs égards … Ah si j’étais blanche ! Là où les noirs sont systématiquement accusés, montrés du doigt, mis sous surveillance, discriminés, humiliés, rabaissés, traités comme des sous-hommes, les blancs semblent être glorifiés, enjolivés, mis sur un piédestal, élevés au rang de Dieux sur terre. Ah si j’étais blanche ! Ma vie serait tout autre … Enfin c’est ce que j’imaginais. Aveuglée par le poids des difficultés, ne serais-je pas moi-même tombée dans le piège que je dénonce ? La couleur de peau est-elle gage de bonté, de générosité ou d’empathie ? Aujourd’hui je peux le dire, la réponse à cette question est non. Mon parcours difficile m’a démontré que ces vertus peuvent se retrouver dans chaque personne. La main tendue par certains blancs fut parfois bien plus ferme que celle de certains noirs. L’inverse a été vrai aussi. Les injustices que j’ai subies m’ont-elles poussée à voir les choses autrement ? Noirs … Blancs … Jaunes … Peu m’importe aujourd’hui la couleur de peau, j’ai compris qu’il ne s’agit que d’une enveloppe qui peut cacher le pire comme le meilleur, et ayant compris ceci, j’ai tout gagné.
Espace 28 répond également à de nombreuses sollicitations de professionnels de l’action sociale mais aussi de la santé sur des questions spécifiques liées à l’accompagnement de personnes migrantes.
Ce travail d’accompagnement est nécessaire. Il a un réel effet multiplicateur.
Par ailleurs, différents outils de sensibilisation sont utilisés pour faire découvrir la réalité des migrants à un large public.