« J’étais étranger et vous m’avez accueilli » (Matthieu, 25, 35) : s’appuyant sur l’Évangile, le Pape François a fait de la question brûlante des migrants le centre paradigmatique de son pontificat.
En résonance avec une partie des citoyens belges, catholiques ou non, l’Église de Belgique est, elle aussi, montée en première ligne sur cette question qui dérange une partie des milieux les plus conservateurs. « Or, rappelle Mgr Delville, évêque de Liège, la question migratoire est depuis sa naissance dans les gènes du catholicisme. » L’Église joue-t-elle son âme sur cette problématique ? Le 8 juillet 2013, une vedette des garde-côtes italiens entre dans le port de l’île sicilienne de Lampedusa, à 138 km des côtes africaines. S’immobilise. Une couronne mortuaire est jetée à la mer pour « pleurer sur les 20.000 morts » anonymes qui ont payé de leur vie, depuis vingt ans, leur traversée de la Méditerranée vers un monde meilleur. Nul ne le sait encore mais c’est un acte symbolique d’une portée capitale que, depuis ce bateau de la Guardia Costiera, vient de réaliser le Pape François. Pour son premier voyage hors les murs de Rome, il n’a pas opté pour une visite aux grands de ce monde ni même pour une rencontre avec des fidèles mais pour une visite aux plus démunis, ces milliers d’hommes et de femmes devenus de pauvres hères fuyant les catastrophes politiques, sociales, religieuses, économiques, naturelles ou climatiques d’Afrique et du Moyen-Orient. Un peu moins de trois ans plus tard, François ira plus loin encore : à Pâques 2016, direction cette fois l’île grecque de Lesbos où arrivent alors de nombreux Syriens fuyant la guerre atroce que livre le régime de Bachar Al-Assad à son opposition et, au fond, à son peuple. La dimension symbolique augmente d’un cran : cette fois, après avoir lavé les pieds de onze réfugiés abrités dans un foyer de la banlieue de Rome à l’occasion du Jeudi saint, le Pape ramène de Lesbos 12 migrants (6 adultes et 6 enfants, soit au total trois familles musulmanes) à bord de son avion d’Alitalia. Difficile de formuler un message plus clair quand on est à la fois un chef d’État et un leader spirituel…