Active à Bruxelles depuis 2005, l’asbl a lancé une antenne à Liège en 2019. Approche pluridisciplinaire psycho-médico-sociale. Soin des sans-abris dans la rue. Accompagnement en vue d’une réinsertion durable en logement et dans la société.
Pouvoir me laver, être chez moi, pouvoir cuisiner manger, dormir quand je veux et oui c’est ça, être moi quoi, être libre, me sentir vraiment chez moi. Pouvoir disposer du temps, de l’espace, et de mon esprit, de mon corps et de mon âme sans que personne ne m’ennuie. C’est important de trouver quelque chose chez soi parce que sinon, dans la rue tu te perds comme ça… t’es vite soumis aux vices comme ça : à la drogue, à l’alcool, tout ça. C’était l’horreur… On avait froid, j’avais toujours mon sac de couchage. Il est là d’ailleurs. Et on se couvrait bien, on mettait deux couvertures. Mais bon tu te réveilles, t’es toujours dans la rue. Et ce qu’il y a c’est que les premiers temps, quand j’avais un des appartements trouvés par Infirmiers de rue, quand je me réveillais, j’avais l’impression que j’étais dans la rue. C’est dingue hein ! Alors je me réveillais, je me disais : ah mais j’ai un chez moi ! Et le cerveau met un temps fou pour réaliser. Il m’a fallu quoi, ça fait déjà un an que je suis ici ? Oui c’est juste ces derniers temps que mon cerveau arrive à comprendre que je suis ici. Maintenant j’ai la ferme volonté de ne plus boire quoi que ce soit. Pas d’alcool. Je bois tout le temps du thé chaud ou froid. La rue, c’est pas la liberté, la rue c’est une prison ! J’ai tellement peur de nouveau de me retrouver à la rue, parce que c’est l’enfer ! Je ne voudrais plus jamais me retrouver à la rue : ce serait me tuer.
Luc, patient ayant vécu 9 ans en rue.
L’asbl « Infirmiers de rue » (IDR) née à Bruxelles en 2005, est une association médico-sociale convaincue que la fin du sans-abrisme est possible. L’approche par l’hygiène, la valorisation de talents des personnes sans-abri, l’implication intensive du réseau d’associations sociales et médicales existantes et la création de logements sont autant de leviers que l’asbl utilise pour réussir la réinsertion durable, en logement et dans la société, des personnes sans-abri.
Les patients dont IDR va s’occuper seront les personnes les plus vulnérables de la ville de Liège, qui cumulent des problèmes de santé importants.
Que fait IDR ?
• Motiver les personnes vivant en grande précarité à prendre soin de leur hygiène et de leur santé ;
• Restaurer le dialogue entre ces personnes et le réseau d’associations médicales ou sociales et de services administratifs existants ;
• Améliorer leur environnement pour une meilleure prise en charge de leur santé ;
• Accompagner ces personnes par le biais d’une approche globale pluridisciplinaire (psycho-médico-sociale) jusqu’à leur réinsertion durable dans un logement et dans la société et une meilleure santé.
Dans notre travail d’accompagnateur, nous sommes souvent focalisés sur les démarches administratives, sociales et médicales ; cela à juste titre car c’est ce qui permet d’accéder à un retour à une vie plus digne dans le futur. Sans des moments de qualité où on se centre sur le bien-être de la personne, on passerait à côté de l’humain que nous accompagnons, avec ses ressources, ses forces et ses envies spécifiques. En discutant des moments bien-être avec un patient que nous accompagnons et qui est actuellement relogé dans une institution, il m’a exprimé que ces sorties et activités le font se sentir vivant. Ces moments lui font oublier son quotidien : il ne pense plus à sa vie et à ses problèmes, il se sent « comme vous, comme un être humain ». Ces derniers mots m’ont interpellé et quand je lui ai demandé ce qu’il entendait par « être comme nous », il m’a répondu « pas comme un SDF, quelqu’un qui ne sert à rien, mais comme quelqu’un qui a une vie normale ». Il a ajouté que c’était « des moments chouettes de sa vie, contrairement aux autres moments ». Des échanges de ce genre nous confortent dans l’idée que ce n’est pas possible d’avoir une prise en charge adéquate et humaine si nous ne pouvons pas réaliser ces moments et prendre le temps de rencontrer ces personnes avec bienveillance et humanisme.
Nicolas, infirmier à l’antenne liégeoise d’IDR.