Combattre la souffrance psychique des migrants
Accueillir et offrir des soins de santé mentale à des personnes d’origine étrangère en grande souffrance psychique. Environ 300 à 350 personnes sont aidées, hommes, femmes et enfants. Consultations thérapeutiques et sociales, activités collectives…
Layla, bénéficiaire
Je m’appelle Layla. Je viens à Tabane depuis longtemps. Au début, je n’osais pas parler. Petit à petit, avec la psychologue et avec les personnes qui viennent dans les activités collectives, j’ai appris beaucoup de choses, j’ai appris à prendre la parole. Avant, je n’osais pas téléphoner. Je demandais tout le temps à l’assistante sociale de le faire pour moi. Maintenant, c’est encore parfois difficile mais j’ose le faire beaucoup plus. Avec Monique, on a aussi fait beaucoup de sorties. On est allé au théâtre, on est allé visiter des musées. Souvent mes amies s’étonnent quand je leur dis que je connais bien ça ou que je connais bien ça, et c’est à cause de Tabane.
Les personnes qui fréquentent l’association ont souvent vécu des situations très dures de violences intentionnelles (persécutions, guerres, tortures, etc). Il peut s’agir de demandeurs d’asile, de personnes sans papiers, de réfugiés reconnus, de migrants par regroupement familial mais aussi d’étudiants étrangers, d’enfants adoptés, de couples mixtes, etc.
Monique, bénévole
Je suis bénévole à Tabane un jour par semaine. L’accueil de la personne est au centre du dispositif. A son arrivée dans le service pour rencontrer l’assistante sociale ou la psychologue, je propose à la personne un café ou un thé et on parle un peu. A la fin de sa consultation, la personne repasse au rez-de-chaussée, participe à un jeu, passe au jardin, se détend, parle de ses projets…
La plupart viennent régulièrement et considèrent que Tabane est un peu leur famille. De grands projets comme une journée à la mer ou un projet avec d’autres associations comme « Drôles d’oizos» aident au développement de bonnes relations entre les personnes, permettent aussi de créer des liens, de reprendre confiance, de s’épanouir et de suivre un chemin vers l’autonomie.
Les thérapies, les rencontres individuelles et collectives renforcent la confiance des personnes. Chacun reçoit et chacun donne, qu’il soit bénéficiaire ou bénévole.
« TABANE » est le nom d’un guérisseur traditionnel établi à Saint-Louis au Sénégal, décédé aujourd’hui. Ceux qui l’ont rencontré ont reconnu son intelligence, sa profonde humanité et la rigueur de sa pratique.
L’activité principale de l’association est de proposer des consultations psychothérapeutiques, des activités sociothérapeutiques et des séances de groupes ethnopsychiatriques (c’est-à-dire, groupe de discussion autour du problème d’une famille ou d’un groupe de personnes, avec plusieurs thérapeutes qualifiés et différents par leurs formations et leurs origines culturelles). L’asbl donne aussi des formations aux professionnels du secteur psycho-médico-social.
L’équipe comprend 4 psychologues, une assistante sociale, un ergothérapeute, une anthropologue, un agent d’accueil, une secrétaire et un coordinateur. TABANE collabore étroitement avec le Club André Baillon, service de santé mentale qui dispose d’une équipe spécifique pour mener une action auprès des personnes migrantes.
En 2018, TABANE a accueilli et suivi 321 personnes de 42 nationalités différentes. Les principaux pays d’origine sont la Syrie, l’Afghanistan, l’Irak, la Guinée, la Palestine … La majorité des consultations se déroulent avec interprètes. Ceci est fondamental dans l’approche de l’association puisque non seulement les interprètes facilitent la communication mais, en plus, ils jouent un rôle important de “médiateur culturel” puisque, souvent, ils connaissent la culture des patients.
Davy, travailleur
Je travaille à Tabane comme animateur de l’espace collectif.
Dans ce cadre, je suis amené à être en lien étroit avec nos patients et à accepter l’affection qui découle de notre pratique et de nos rencontres.
La plupart du temps, les bénéficiaires m’appellent « Monsieur Davy », et je sens dans cette façon de m’appeler une forme d’affection et de respect.
Avec certaines dames africaines plus âgées, je me dois de les appeler « Maman » (marque de respect culturel) et elles de me répondre « Mon Fils » avec toutes les marques d’affection et de générosité qui accompagnent notre relation.
« Comment allez-vous Maman aujourd’hui ? »
« Hooo mon fils… Merci de te préoccuper de ta Maman… Ta maman ne va pas bien … Je suis attaquée dans le dos et ça me fait souffrir… » (Maman Pauline).
« Que Dieu te bénisse mon cher Fils… Qu’il te protège toi et tous ceux de Tabane………… » (Maman Jacqueline) Maman Jacqueline ne tarit pas de remerciements et de références à la bienveillance divine qui lui a donné un autre fils (moi) et une famille, Tabane …