Un homme et une femme à table en devant des assiettes de frites et de viande.
L’Assiette pour tous crée du lien social depuis 30 ans.
© F. Pauwels / Collectif HUMA

À Tournai, une assiette pleine depuis 30 ans !

Depuis 1993, à Tournai, l’Assiette pour tous propose 17.000 repas par an aux publics les plus défavorisés. Avec un prix quasiment inchangé en trois décennies. Mais aussi une flambée des besoins au cours des derniers mois.

Ce jour-là, comme tous les jeudis, Alain Audoor remplit sa mission le rire aux lèvres : « Ce n’est pas pour rien qu’on me surnomme M. Patate ! Regardez : 60 kg de frites en une matinée ! »
Pensionné actif, Alain sait que son passage à l’Assiette pour tous est particulièrement attendu par les Tournaisien·nes qui fréquentent ce restaurant social. « On affiche complet les jours du spaghetti bolognaise, des chicons au gratin et des frites ! », sourit Olivier Catoire, le coordinateur de l’ASBL depuis trois décennies.

Cet automne, cela fait 30 ans que l’Assiette pour tous a commencé à proposer des repas à l’instigation d’un industriel local. « Il y a 30 ans, le prix était déjà de 120 francs (soupe, plat,
dessert, café) : nous avons pu le garder durant trois décennies mais, là, l’inflation vient de nous forcer à le porter de 3 à 3,5 €. Les personnes retraitées ou sous administration de biens paient, les gens qui vivent dans la rue reçoivent des tickets du CPAS.
Depuis longtemps, nous tournons à une moyenne de 60 repas par jour mais, désormais, nous dépassons les 100 personnes. La situation est de plus en plus compliquée. Au départ, notre public était surtout composé de personnes pensionnées qui ne s’en sortaient pas. Mais, là, on voit bien qu’il y a de plus en plus de jeunes et de personnes sans abri.
Depuis peu, on a ajouté un petit déjeuner avec les invendus des boulangeries : sinon, à 11h, certains arrivent complètement affamés, voire alcoolisés. »

Catherine Debliquy, coordinatrice du restaurant, établit les menus en fonction des marchandises données par la banque alimentaire, l’association achetant ellemême la viande. Tous les repas sont préparés par des bénéficiaires, bénévoles ou employés en contrat « article 60 ». « Au fond, résume Olivier Catoire, nous faisons autant de la réinsertion sociale que socioprofessionnelle.
On retisse du lien social : des personnes retraitées qui vivent seules et n’ont pas envie ou les moyens de se faire à manger viennent ici faire des rencontres. »

Elie Jacquemart, 34 ans et « article 60 » à l’Assiette après avoir « fait un stage dans la rue », résume : « C’est un tremplin. Ce sentiment de se rendre utile, de retrouver une dignité, est fondamental. J’avance dans la vie. L’Assiette m’a permis de retrouver confiance en moi. Je n’avais plus ce moteur pour me lever tous les matins. J’ai eu cette main tendue et je me suis empressé de la saisir. »

# jt203