Cabane sensorielle, projecteurs lumineux, colonnes à bulles, poufs, gels texturés : le « snoezelen » permet de ralentir le rythme et de prendre le temps d’écouter son corps et son esprit. Une démarche qui devient thérapeutique lorsque le corps et l’esprit sont en lambeaux.
C’est un container maritime, dont l’intérieur a été entièrement peint en noir, qui va accueillir prochainement « Bien dans ma bulle », l’espace « snoezelen » de la Maison maternelle Paul Henricot, à Court-Saint-Étienne. Développée dans les années 1970 par deux jeunes Néerlandais, cette approche se fonde sur la recherche de bien-être par la mobilisation de tous les sens (en néerlandais, snoezelen est la contraction de snuffelen, renifler, et de doezelen, somnoler).
L’achat du mobilier et de l’équipement nécessaires à cette exploration sensorielle est financé par Action Vivre Ensemble et par deux petits dons complémentaires. L’aménagement devrait être finalisé d’ici à la fin de l’année, ce qui réjouit particulièrement Ophélie1Prénom d’emprunt et son fils de sept ans, Léo2Prénom d’emprunt, accueillis à la Maison maternelle Paul Henricot depuis plusieurs mois. « Via l’association, nous avons plusieurs fois testé un espace « snoezelen » à Rixensart. Mon petit garçon, qui a des besoins particuliers et canalise difficilement son énergie, s’y est tout de suite senti très bien. Grâce à cette plongée dans un monde doux et calme, je l’ai senti apaisé, comme si un gros poids venait de s’enlever de ses épaules », raconte Ophélie.
Posé dans le jardin de la maison maternelle, le container destiné à abriter cette « bulle de bienêtre » occupe volontairement une position extra muros pour marquer la césure avec le quotidien difficile des personnes hébergées.
Des problématiques de plus en plus lourdes
Dotée d’une capacité de 25 lits, la Maison maternelle Paul Henricot accueille principalement des mères ou des futures mères ayant fui des violences intrafamiliales et se retrouvant de facto privées de logement. Les enfants, eux, présentent de nombreuses carences affectives et éducatives, des signes de dépression, des retards de langage ou moteurs, des problèmes d’hygiène, etc.
En 2023, ce centre d’accueil brabançon a hébergé 24 adultes et 39 enfants – et a dû décliner 224 demandes. « Les besoins sont de plus en plus nombreux et les problématiques de plus en plus lourdes, nécessitant souvent d’importants suivis psychologiques ou psychiatriques », détaille Alain Brossé, responsable administratif et financier de la Maison maternelle Paul Henricot. La durée moyenne des séjours clôturés en 2023 était de 178 jours, les mandats ayant une durée maximale de neuf mois, prolongeable trois fois. Depuis 2017, l’association maintient en permanence deux lits inoccupés afin de répondre à des situations d’urgence.
Perdre tous ses repères
Dans le cas d’Ophélie, c’est un bras cassé à la suite d’une énième volée de coups, donnés par son compagnon, qui a été le déclencheur. « J’ai été hospitalisée et, grâce à l’assistante sociale de l’hôpital, j’ai obtenu une place en maison maternelle. Jusque-là, je n’avais jamais osé partir, je ne trouvais pas la force nécessaire et, surtout, j’avais très peur de ce qui m’attendait si je partais. Est-ce que j’allais pouvoir m’en sortir seule, sans l’aide de mon compagnon ? Je n’ai pas de travail et je ne savais pas comment j’allais m’en sortir financièrement », explique Ophélie.
« Les débuts ont été très difficiles pour moi », poursuit la jeune maman. « J’avais perdu tous mes repères et n’avais ni famille ni amis à proximité de l’institution. Heureusement, l’équipe m’a vraiment bien accueillie. J’ai une éducatrice de référence qui me soutient et m’épaule dans la relation avec mon fils, car celui-ci est très perturbé et fait parfois preuve de violence. Nous sommes également accompagnés par une psychologue et aidés dans la résolution de mes problèmes financiers. »
Chaque projet d’accompagnement est individualisé, tant pour la mère que pour son ou ses enfant(s). L’objectif étant, dans la mesure du possible, de regagner à terme son autonomie et de reprendre sa vie en mains. Le projet « snoezelen » s’inscrit dans cette prise en charge globale et « fait sens » par rapport aux autres activités mises en place. « Prisonnières de leurs difficultés, nos hébergées se retrouvent souvent hors tempo, incapables de suivre le rythme effréné que la société leur impose. Alors, il est important pour elles d’avoir des temps de pause et de reconstruction individuels. L’approche ‘snoezelen’ permet cela, avec des outils originaux », conclut Alain Brossé.
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